Les cépages résistants, la solution aux challenges d’aujourd’hui et aux besoins de demain ?

𝚀𝚞𝚎𝚕𝚕𝚎𝚜 𝚜𝚘𝚕𝚞𝚝𝚒𝚘𝚗𝚜 𝚙𝚘𝚞𝚛 𝚙𝚛é𝚜𝚎𝚛𝚟𝚎𝚛 𝚕𝚊 𝚋𝚒𝚘𝚍𝚒𝚟𝚎𝚛𝚜𝚒𝚝é, 𝚕𝚊 𝚚𝚞𝚊𝚕𝚒𝚝é 𝚍𝚎𝚜 𝚜𝚘𝚕𝚜 𝚎𝚝 𝚕𝚎 𝚐𝚘û𝚝 𝚍𝚞 𝚟𝚒𝚗 𝚝𝚘𝚞𝚝 𝚎𝚗 𝚐𝚊𝚛𝚍𝚊𝚗𝚝 𝚞𝚗 𝚛𝚎𝚗𝚍𝚎𝚖𝚎𝚗𝚝 𝚘𝚙𝚝𝚒𝚖𝚊𝚕 ? 

La dépendance de la vigne aux produits phytosanitaires est devenue un  problème et une inquiétude majeurs dans toutes les régions viticoles. Que l’utilisation soit régulière ou raisonnée, l’obtention de vin de qualité est difficilement envisagée sans ces produits chimiques ou biologiques. Or, nous savons depuis quelques années que les intrants, notamment chimiques, peuvent être problématiques pour la santé, mais aussi pour la biodiversité : appauvrissement des sols, déclin des invertébrés terrestres, dont des insectes pollinisateurs et des prédateurs de ravageurs (coccinelles, carabes…), ainsi que des oiseaux.

La richesse des sols et des milieux est indispensable pour assurer l’équilibre des écosystèmes, et notamment des chaînes alimentaires, depuis les bactéries et autres décomposeurs du sol, jusqu’aux prédateurs secondaires. Si l’on ne se soucie pas de cette biodiversité et des êtres vivants qui peuplent les vignobles, ils ont pourtant un rôle bénéfique sur les cultures. Ces auxiliaires peuvent en effet réguler les espèces indésirables, limitant ainsi l’impact négatif sur les vignobles. 

Les challenges qui nous attendent demain, bien qu’encore inconnus dans leur grandeur, se sont déjà fait ressentir : hausse des températures et sécheresse d’un côté, maladies cryptogamiques de l’autre. Les animaux et les plantes sont affectés par les changements de température et du cycle de l’eau : ils se déplacent, disparaissent ou prolifèrent. Les risques pour les vignobles sont importants et s’expriment par une diminution de la production, cauchemar des vignerons.La prolifération du mildiou, de l’oïdium, du black rot ou la maladie du bois ont fait naitre des solutions créatives : parmi celles-ci, les cépages hybrides. Le principe est simple : il s’agit d’un croisement entre une espèce résistante et un cépage habituellement cultivé. 

Outre l’aspect de résistance aux champignons, l’intérêt du monde viticole est grandissant face aux cépages originaires de divers pays méditerranéens, comme le Portugal, l’Italie ou la Grèce. Ils pourraient en effet présenter des facultés d’adaptation dans un contexte croissant de sécheresse et de températures élevées. Longtemps réticente, la France pourrait voir dans l’arrivée de ces cépages de pays méditerranéens une source d’inspiration pour lutter contre les effets néfastes des changements climatiques observés ces dernières années. 26 cépages sont ainsi inscrits au catalogue français. Plusieurs se trouvent déjà dans le cahier des charges d’IGP et même d’AOP dans un cadre expérimental. Plusieurs observations ont déjà été faites quant à leur résistance au gel ou à la sécheresse, tout en préservant un niveau suffisant d’acidité.

Certains pays comme la Belgique utilisent depuis longtemps des cépages hybrides allemands pour contrer le climat plutôt humide. Marc Vanel, expert belge, nous parle de 40 % des surfaces plantées! Les principaux cépages utilisés sont le Johanniter (3ème cépage le plus fréquemment plané après le Chardonnay et le Pinot Noir), le Solaris et le Souvignier gris.

L’intérêt pour ces nouvelles variétés est très grand en Italie du Nord et dans les pays nordiques, où la notion de terroir est moins importante qu’en France. La vinification de ces variétés méditerranéennes doit encore être étudiée davantage. C’est l’un des rôle de PIWI international, un groupe de travail regroupant des entités nationales dans plusieurs pays, comme l’Allemagne, l’Italie et la Suisse, pour la promotion des cépages résistants. L’objectif est de faire connaître ces cépages par le partage des avancées scientifiques et de la construction d’un réseau d’information.

Outre leur intérêt indéniable face aux défis de la nature, les cépages résistants peuvent apporter un plus en termes de santé, mais aussi de stabilité de production.

Il reste une série de questions en suspens à l’heure actuelle concernant les cépages résistants.

Premièrement, le goût. Il est différent des cépages classiques, et si le connaisseur peut les apprécier, en sera-t-il de même pour l’amateur ? Les pays du nord et de l’est de l’Europe semblent plus enclins à accepter des arômes nouveaux, notamment grâce à une clientèle plus jeune. 

Deuxièmement, la durabilité. Ces cépages auront-ils une durée de vie  équivalente, voire supérieure ?

Une autre  solution aux menaces climatiques sur la vigne passe peut-être par l’aridoviticulture.  Dans le numéro d’octobre 2022 de la Revue des Oenologues, Joël Rochard aborde ce concept au travers des exemples de Lanzarote et Santorin. La lutte contre les stress hydriques sévères pourrait passer  par cette approche qui limite les besoins en eau de la vigne.

On le voit, il y a un certain degré d’urgence à mettre en place des solutions pérennes pour le maintien d’une vigne de qualité et pour la survie des hommes qui y sont tellement attachés.

 

 

 

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